Ici, Istambul c'est bien loin. Les seuls
Turcs, flics ou militaires colorent de tâches kakies ou bleu-marines
le paysage sauvage. Bienvenue au Kurdistan. "Kurdish, kurdish, no problem
!", nous crie-t-on du bord de la route. Sous les moustaches et les joues noires
de barbe, des sourires chaleureux, des regards bienveillants et fiers, une
identité forte et vainement bafouée. Une petite route tranquille
grimpe dans une campagne travaillée comme un jardin bucolique. Les
sommets alpins enneigés grossissent à vue d'oeil. Ca grimpe
et c'est superbe. "Vous allez à Van ? Mais y a de la neige jusqu'au
nombril !" Ils sont peut-être Marseillais ces Kurdes !" Il est où
ce lac ? C'est ça, masse sombre, lugubre, à peine perceptible
dans un brouillard purée de pois.
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Quelques
jours bloqués à Tatvan dans le silence ouate de tonnes de poudreuse,
des litres de thé pour nous réchauffer et nous embarquons, frileuses,
dans un bus. Dans l'aquarium, le nez sur la vitre, les bleus, les verts bouillonnants
du lac nous éclaboussent. Les 4000 mètres immaculés se
jettent violemment dans l'eau cristalline. Ouah! Le Groënland kurde. Frustration
de ne pas rouler dans ce decors. Dogubayezit, Dogubayezit, tout le monde descend,
terminus du bout du monde. Un mont Ararat timide et pudique qui se montre subrepticement
sous les nuages, nos dernières bières avec Parachute et Sali,
nos moustaches préférées, une partie de chasse à
la perdrix, un barbecüe, un boeuf bourguignon (et oui !), et nous nous
décidons enfin à partir.
Le foulard dans notre pochette avant, nous nous dirigeons vers la frontière
iranienne. C'est le 8 Mars, journée de la femme et une drôle de
commémoration pour les globe-tortues. Le KURDISTAN, des gens avec un
coeur gros comme ça, des routes à faire rêver tous les fous
du vélo. Un seul point noir, les chiens d'Anatolie hyper-musclés
et aussi agressifs que leurs maîtres sont sympas. Brrr... On reviendra
quand même ! |